Brève urbanisme #4

Précisions sur l’appréciation du rapport de compatibilité entre un projet et une OAP.

On sait que les orientations d’aménagement et de programmation (« OAP »), lorsqu’elles existent, sont opposables aux demandes de permis de construire dans un rapport de compatibilité (article L. 152-1 du code de l’urbanisme).


Ainsi, les plans locaux d’urbanisme peuvent prévoir plusieurs types d’OAP :

  • – Des OAP sectorielles qui portent sur un quartier ;
  • – Des OAP thématiques qui déclinent un enjeu sur tout le territoire ;
  • – Des OAP hybrides qui portent sur une thématique précise appliquée à un secteur.

Le rapport de compatibilité entre les OAP et les autorisations d’urbanisme a été déjà précisé par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 30 décembre 2021 aux termes duquel il a indiqué « qu’une autorisation d’urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu’elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d’aménagement et de programmation d’un plan local d’urbanisme et, en particulier, en contrarient les objectifs » (CE, 30 décembre 2021, req. n° 446763).


L’affaire dont avait ici à connaître le Conseil d’Etat permet de préciser l’appréciation de ce rapport de compatibilité.


En l’espèce, un permis de construire avait été accordé pour la réalisation de 17 logements sociaux répartis dans 3 bâtiments.


Le Tribunal administratif de Lyon, saisi d’un recours en annulation, a annulé partiellement ce permis de construire, en application de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, en tant qu’il était incompatible avec une OAP, et qu’il méconnaissait les dispositions de l’article 10 du PLU relatives à la hauteur des constructions.


En effet, le terrain d’assiette du permis était situé sur un secteur couvert par une OAP qui prévoyait notamment, dans un objectif de renforcement de la mixité fonctionnelle à l’entrée du village, qu’une part importante des surfaces de plancher en rez-de-chaussée doit permettre l’accueil d’activités de service.


Le société pétitionnaire s’est pourvu en cassation et soutenait qu’il ne pouvait être déduit du seul constat que le projet ne prévoyait aucune activité de service en rez-de-chaussée, son incompatibilité avec l’OAP.

A RETENIR

Le Conseil d’Etat annule le jugement du Tribunal administratif en exposant que le rapport de compatibilité s’apprécie en procédant à une analyse globale des effets du projet sur l’objectif ou les différents objectifs d’une OAP, à l’échelle de la zone à laquelle ils se rapportent. Il expose qu’il incombe au juge administratif de rechercher si les effets du projet doivent être regardés comme suffisants pour contrarier, par eux-mêmes, les objectifs de l’OAP à l’échelle de la zone à laquelle l’orientation se rapporte.

Le Conseil d’Etat adopte donc une approche souple du rapport de compatibilité puisqu’il considère qu’un projet n’est pas incompatible avec une OAP alors même qu’il ne concourt pas à la réalisation des objectifs qui y sont fixés.


Le Conseil d’Etat favorise une appréciation globale du rapport de compatibilité, à l’échelle du secteur couvert par l’OAP, et non au regard du seul projet en cause. En effet, les OAP ont vocation à fixer des orientations générales pour un secteur, et non à se substituer aux prescriptions du règlement.

Retrouvez ici la décision du Conseil d’Etat (CE, 18 novembre 2024, req. n° 489066).

Certificat d’urbanisme et cristallisation du droit applicable.


Par un second arrêt du même jour, le Conseil d’Etat apporte des précisions sur l’effet cristallisateur du certificat d’urbanisme.


Pour rappel, l’obtention d’un certificat d’urbanisme permet à son titulaire de bénéficier d’une cristallisation des règles d’urbanisme en vigueur à la date du certificat, dès lors que la demande de permis de construire est déposée dans les dix-huit mois suivant la délivrance de ce certificat (article L. 410-1 du code de l’urbanisme).


En l’espèce, un pétitionnaire avait obtenu un certificat d’urbanisme, puis avait déposé une demande de permis de construire dans le délai de 18 mois suivant la délivrance de ce certificat. Le permis délivré à la suite de cette demande était attaqué, ainsi que le certificat d’urbanisme.


L’un des moyens soulevés par les requérants tenait à l’absence de caractère exécutoire du certificat d’urbanisme dès lors qu’il apparaissait qu’il n’avait pas été transmis au préfet au titre du contrôle de légalité.


Le Conseil d’Etat confirme sur ce point l’arrêt de la Cour administrative d’appel, en jugeant qu’un pétitionnaire peut se prévaloir de la cristallisation des règles d’urbanisme en vertu d’un certificat d’urbanisme, quand bien même ce dernier certificat n’aurait pas été transmis au préfet, cette circonstance étant « sans incidence sur la détermination de la réglementation applicable au permis de construire litigieux ».


De plus, était également soulevé un moyen tiré de l’impossibilité de bénéficier de l’effet cristallisateur du certificat d’urbanisme dès lors que la demande de permis déposée dans le délai de dix-huit mois était incomplète.


En effet, le service instructeur avait adressé au pétitionnaire un courrier de demande de pièces complémentaires, et le dossier de demande avait été complété en ce sens.


Le Conseil d’Etat rejette également ce moyen en exposant « il ne résulte pas des dispositions de l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme qu’un permis de construire déposé dans le délai de dix-huit mois suivant la délivrance du certificat d’urbanisme ne puisse être complété, à peine de perte du droit à ce que la demande soit examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat, qu’avant l’expiration de ce délai ».

A RETENIR

En l’espèce, le Conseil d’Etat relève que la demande déposée dans le délai de dix-huit mois suivant la délivrance du certificat d’urbanisme comportait le formulaire Cerfa, une notice et son annexe, des plans de situation, de masse, de coupe, des toitures, des façades et stationnements, ainsi que des photographies d’insertion.
Bien qu’ayant fait l’objet d’une demande de pièces complémentaires par le service instructeur, on relèvera que la demande de permis déposée dans le délai de dix-huit mois était quasiment complète.

Retrouvez ici la décision du Conseil d’Etat (CE, 18 novembre 2024, n° 476298).